Tout savoir sur le temps partiel thérapeutique (TPT) dans la fonction publique : démarches, enjeux et récentes évolutions #
Définition précise et objectifs du TPT dans la sphère publique #
Le temps partiel thérapeutique (TPT) désigne une modalité d’organisation du temps de travail permettant à un agent de reprendre ou de poursuivre son activité malgré des difficultés médicales. Inscrit dans le code de la santé publique et les statuts de la fonction publique, le TPT vise l’équilibre entre la préservation de la santé et la continuité de l’activité professionnelle.
- Soutien au retour à l’emploi : Ce dispositif favorise la réintégration progressive des agents après un congé maladie ordinaire ou longue maladie.
- Maintien dans l’emploi : Adapté aux situations de santé transitoires, le TPT offre une alternative à la rupture du lien professionnel, limitant les risques de désinsertion.
- Période de rééducation ou de réadaptation : Il accompagne les parcours de reconversion en cas d’inaptitude partielle, notamment avec le concours des cellules de prévention de la désinsertion professionnelle.
À la différence du congé pour maladie qui suspend toute activité, ou du reclassement professionnel qui met fin aux fonctions d’origine, le TPT s’inscrit dans une dynamique de transition active. De ce point de vue, l’État a régulièrement porté des réformes pour clarifier ses contours et étendre ses bénéfices aux contractuels et fonctionnaires stagiaires, y compris depuis la publication du décret du 8 novembre 2021.
Démarches d’accès : conditions, procédure et pièces à fournir #
L’accès au TPT suppose une démarche rigoureuse et documentée. Chaque agent souhaitant bénéficier de ce dispositif doit fournir un dossier complet auprès de son employeur public, s’appuyant sur un avis médical motivé. Le rôle du médecin traitant est central : il rédige un certificat médical qui détaille la durée, la quotité demandée (50 %, 60 %, 70 %, 80 % ou 90 %) et les aménagements souhaités[2].
- Certificat médical circonstancié : Ce document précise la nécessité du temps partiel thérapeutique, la quotité de travail proposée, sa durée initiale (généralement fixée par périodes de 1 à 3 mois, renouvelables jusqu’à un an) et, le cas échéant, les conditions particulières (aménagement d’horaires, tâches inadaptées à écarter).
- Transmission à l’administration : Le dossier médical est remis à la DRH compétente, qui saisit, si besoin, le comité médical ou le conseil médical départemental. Le médecin de prévention peut être consulté en cas de situation complexe, ou si plusieurs refus successifs interviennent.
Certaines administrations comme le Centre de gestion de la fonction publique territoriale du Val-d’Oise (CDG95), ou le Centre hospitalier universitaire de Toulouse, disposent de référents TPT pour accompagner les agents dans la constitution du dossier. L’accord de temps partiel thérapeutique relève in fine de l’employeur, sur la base de l’avis médical, mais il peut être contesté en commission de réforme.
Gestion de la quotité et modalités d’exercice en TPT #
La détermination de la quotité de travail autorisée en TPT est fondée sur une analyse personnalisée, conciliant l’état de santé de l’agent, les exigences de son poste et la continuité du service. Les quotités retenues (majoritairement 50 % ou 70 % selon une étude de la DGAFP sur 2022) doivent être explicitement motivées et réajustées lors des renouvellements[2][3].
- Organisation du temps : L’agent peut répartir son temps soit de manière linéaire (tous les jours à temps partiel), soit par périodes fractionnées (jours pleins travaillés suivis de journées d’absence), sous réserve de compatibilité avec son service d’affectation.
- Limite annuelle : La durée de TPT ne peut excéder un an par période de trois ans, sauf dispositions spéciales pour certaines pathologies chroniques ou invalidantes. Tout nouveau TPT nécessite une instruction complète et une décision motivée du conseil médical pour chaque prolongation.
Au sein du Centre hospitalier universitaire de Lille, 63 agents ont été placés en TPT sur l’année 2023, avec une large majoration des organisations à 60 %. Ces décisions ont reposé sur l’adaptation des horaires, parfois avec un redéploiement temporaire sur d’autres missions ou services.
Rôle et contrôle du médecin agréé : expertises, suivi et contestation #
Le médecin agréé joue un rôle central dans la validation, le suivi et le renouvellement des temps partiels thérapeutiques. Au-delà de 3 mois de TPT consécutifs, un rapport circonstancié doit être établi, explicitant la pertinence médicale de l’aménagement et la compatibilité avec l’évolution de la pathologie[2][3].
- Expertise médicale indépendante : Lorsque l’employeur formule un doute quant à la justification du TPT, ou en cas de désaccord sur la quotité, il peut solliciter l’instruction du dossier auprès du conseil médical.
- Contrôle périodique : Certaines administrations exigent un point semestriel ou annuel, notamment dans les ARS et les grands CHU comme Bordeaux, pour garantir la légitimité continue du TPT et anticiper d’éventuelles évolutions vers l’inaptitude ou un reclassement.
Les recours à l’appel en commission de réforme sont peu fréquents ; ils concernent généralement des refus de renouvellement ou des réévaluations de la quotité, en particulier dans les collectivités. En 2022, 7,4 % des dossiers contestés devant les commissions paritaires de la Fonction publique d’État portaient sur des décisions de TPT, selon les chiffres de la DGRH.
Nouveautés règlementaires et évolution du dispositif #
Le décret n° 2021-1462 du 8 novembre 2021 a profondément refondu le TPT dans la fonction publique, abolitionnant l’obligation d’arrêt maladie préalable et adaptant la reconstitution des droits, notamment après un précédent TPT. Ce texte a unifié les pratiques entre fonctions publiques, clarifié les critères médicaux et réduit certains décalages constatés dans les collectivités.
- Suppression de l’arrêt préalable : L’autorisation de TPT peut dorénavant être prononcée sans transition par arrêt maladie, fluidifiant la reprise progressive du travail.
- Gestion des anciens et nouveaux régimes : Les agents qui avaient débuté un TPT sous l’ancienne réglementation continuent à bénéficier du régime en vigueur à l’époque, jusqu’à la fin de la période engagée, avant de basculer sur le nouveau cadre si besoin.
- Réforme des périodes : Désormais, chaque agent bénéficie d’un droit à la reprise en TPT limité à un an par période de trois ans, quel que soit le motif initial (maladie ordinaire ou affection de longue durée).
- Actualisation des effectifs : Selon la DGAFP, le nombre de TPT dans la Fonction publique d’État a progressé de 22 % entre 2022 et 2024, avec une majorité d’employeurs publics satisfaits de la souplesse accrue du dispositif.
Les nouvelles règles permettent une gestion plus fine du retour à l’emploi, à l’instar de la politique déployée au Ministère des Armées, qui a anticipé ces évolutions via des formations spécifiques pour les RH dès 2023.
Enjeux RH et organisationnels autour du TPT #
L’intégration du TPT suscite des défis de plus en plus pointus pour les services des ressources humaines au sein des administrations.L’organisation du service, la coordination des acteurs et l’adaptation opérationnelle des postes sont des enjeux forts rencontrés notamment au sein des grandes structures territoriales et universitaires.
- Gestion de la continuité : La réorganisation des plannings, la gestion des remplacements ponctuels ou la réaffectation transitoire nécessitent une anticipation précise, surtout si la quotité évolue d’un renouvellement à l’autre.
- Adaptation du poste : Certains employeurs, comme le Département du Nord, ont mis en place des dispositifs de bilan de compétence santé, permettant de redéfinir le périmètre des missions compatibles avec les restrictions médicales.
- Sensibilisation et prévention : Plusieurs ministères ont élaboré en 2023 des plans d’action dédiés pour informer agents et encadrants, prévenir le sentiment d’exclusion ou d’iniquité, et accompagner la trajectoire post-TPT.
La protection des données de santé fait l’objet d’une vigilance renforcée, conformément aux exigences de la CNIL et de la réglementation RGPD, les informations médicales restant accessibles exclusivement aux professionnels habilités. Le dialogue social s’est accéléré sur la base d’observations issues du terrain, et certaines branches ont mis en œuvre des cellules d’écoute pour prévenir les risques de stigmatisation.
Perspectives : vers une meilleure intégration du TPT dans les parcours professionnels publics #
Le TPT s’inscrit dorénavant parmi les outils de pilotage de la qualité de vie au travail, permettant une approche moins rigide du maintien en emploi, tout en renforçant la lutte contre la désinsertion professionnelle dans la fonction publique. La mission d’appui au retour à l’emploi du ministère de l’Économie et des Finances a observé que la majorité des agents placés en TPT en 2024 ont pu reprendre progressivement un rythme proche du temps plein, avec une réduction substantielle du taux d’inaptitude définitive.
- Amélioration continue : Plusieurs pistes d’optimisation émergent, comme le renforcement de la formation des encadrants à l’accompagnement des temps partiels, l’appui systématique des cellules de prévention, ou la diffusion de référentiels de pratiques partagées entre administrations.
- Diversification des parcours : L’inclusion de personnes atteintes de maladies chroniques rares – telles que la sclérose en plaques ou certains cancers – dans les dispositifs de TPT, s’est traduite dans plusieurs régions, notamment en Auvergne-Rhône-Alpes, par une meilleure intégration des situations individuelles complexes.
- Prévention durable : L’utilité du TPT se confirme dans la prévention du recours aux congés longue durée, la réduction du volume global des arrêts maladie, et plus largement dans la limitation de la désinsertion professionnelle, soulignée dès 2022 par le rapport IGAS.
Dans cette perspective, il serait nécessaire d’encourager une dynamique de co-construction des solutions entre l’agent, la médecine du travail, les RH et les managers, pour assurer au fil des années un usage pérenne, protecteur et efficace du temps partiel thérapeutique, au service du maintien dans l’emploi et de la santé au travail dans le secteur public.
Plan de l'article
- Tout savoir sur le temps partiel thérapeutique (TPT) dans la fonction publique : démarches, enjeux et récentes évolutions
- Définition précise et objectifs du TPT dans la sphère publique
- Démarches d’accès : conditions, procédure et pièces à fournir
- Gestion de la quotité et modalités d’exercice en TPT
- Rôle et contrôle du médecin agréé : expertises, suivi et contestation
- Nouveautés règlementaires et évolution du dispositif
- Enjeux RH et organisationnels autour du TPT
- Perspectives : vers une meilleure intégration du TPT dans les parcours professionnels publics